05
Jul
2025

L'épreuve d'amour

J'ai été hospitalisée en urgence la semaine du 2 juin, depuis laquelle je reste alitée pour retarder autant que possible un accouchement prématuré.

J'avais déjà dû, par deux fois, attendre pendant de longues semaines des informations cruciales, qui conditionnaient la viabilité de mon enfant. Je régulais alors mon sentiment d'impuissance en me concentrant sur d'autres préoccupations, avec des activités telles que l'aménagement de notre maison, le soin de mon corps, la préparation de petits plaisirs culinaires ou encore la planification de mes séances grossesse.

Pour ce troisième trimestre, l'exercice de patience dans l'inquiétude durera trois mois entiers, mais surtout, se fera en position allongée. Et je réalise, depuis, que compter les jours en priant pour que tout aille bien, est mille fois plus éprouvant dans le cadre d'une oisiveté forcée.

Sur la recommandation à la fois d'un ami catholique et d'une amie musulmane, mon mari et moi avons commencé la série The Chosen. N'appartenant à aucune religion et étant assez peu intéressée par la vie des prophètes en général, je n'attendais pas grand chose d'une histoire sur Jésus de Nazareth. Au final, me voilà happée dans un véritable voyage spirituel depuis mon canapé, avec mon cher et tendre dont les discussions rendent ce petit pèlerinage d'autant plus prégnant.

Pour ceux qui connaissent les Évangiles par cœur, j'imagine que l'humanisation visuelle des personnages enrichit leurs interactions, au point de donner une dimension nouvelle au récit qui en est fait. Je voudrais rapporter certaines de ces interactions, en apparence anecdotiques, qui ont particulièrement résonné avec mon propre parcours.

Attention, spoilers.

L'effacement et l'assertion

Nous avons ri de ma ressemblance avec Marie de Magdala, de par nos approches, nos réactions et nos failles ; lorsqu'elle décrit la lumière omniprésente dans sa vie après avoir retrouvé Dieu, lorsque ses démons la rattrapent, lorsqu'elle verbalise son aigreur face à une disciple sans-gêne, "entitled".

De l'épisode où cette dernière fait irruption pour réclamer avec aplomb que l'on soigne son frère, mon mari avait retenu sa détermination à s'en sortir et sauver ses proches, tandis que j'étais outrée, comme Marie, qu'elle s'impose en détruisant le toit au milieu d'un sermon, sans la moindre considération pour le désir de discrétion de son sauveur ; un pharisien lancera d'ailleurs la garde romaine à ses trousses.

Personnellement, aider et donner à mes proches est un de mes plus grands bonheurs, mais le plaisir et le sens disparaissent dès lors que le don est traité comme un dû. C'est pourquoi je ne réussis pas à éprouver la moindre sympathie envers cette attitude, fût-elle présentée comme de l'audace, une bravoure affranchie des conventions sociales.

J'ai repensé à une pique-assiette qui se servait systématiquement dans mon plat sans mon aval. Je finissais toujours la soirée dans une colère noire ; non parce que j'enviais son culot, mais parce que je détestais mon incapacité à faire respecter mes limites.

Peut-être est-ce la propension de chacun à s'affirmer qui doit être dosée pour nous tolérer les uns les autres ? Dans la série, les protagonistes se réconcilient en concluant qu'elles devraient chacune s'inspirer un peu plus l'une de l'autre.

L'humilité scientifique

Parmi les apôtres de Jésus, deux sont dotés d'une intelligence rationnelle hors-norme : Matthieu, un génie des mathématiques au sens de l'observation aiguisé, appliqué dans son métier de publicain percepteur d'impôts, et Judas, expert dans les arts de la persuasion et de l'optimisation, promis à une brillante carrière de marchand.

Matthieu assiste à un premier miracle qui bouleverse son monde logique, et alors qu'il a tout à y perdre, il répond immédiatement à l'appel de Jésus. Il accomplit avec minutie son nouveau travail de scribe, mais son esprit cartésien rencontre d'immenses difficultés à saisir les paraboles, omniprésentes dans les discours qu'il retranscrit. Pourtant, jamais il ne doute de la sagesse de son maître : il se contente de poser ses questions et d'espérer qu'il en comprendra les réponses plus tard.

La démarche de Matthieu constitue pour moi un horizon des plus inspirants et honorables : avoir conscience qu'il y a toujours à apprendre et s'entourer de mentors auprès desquels continuer de grandir. Il connaîtra une évolution spectaculaire au fil des expériences que Jésus lui fera vivre, et loin d'être traité comme un simple exécutant, il co-écrira le sermon sur la montagne qui marque le début du ministère.

Le chemin vers l'enfer

De son côté, Judas assiste au sermon sur la montagne et reconnaît aussitôt le Messie des prophéties. Il a dès lors une seule obsession : l'avènement du nouveau roi, pour lequel il est décidé à jouer un rôle important.

J'ai lu récemment que la plupart des gens ne nous voient pas vraiment, mais voient ce que nous éveillons en eux. Judas rejoint les disciples de Jésus en se persuadant qu'il a été choisi pour ses qualités de marchand, que sa mission est de les mettre au service du développement du ministère. À ses yeux, chaque opportunité de renflouer les comptes, s'attirer les faveurs des juifs, renverser l'occupation romaine... doit être saisie pour accomplir la volonté de Dieu – du moins celle qu'il croit comprendre.

Or, Jésus n'entend ni collecter l'argent des foules, ni respecter les lois qui corrompent l'esprit de Moïse, ni exclure les autres peuples de sa révolution. Judas s'obstine à prouver son utilité dans sa propre perspective, pensant voir ce que même le Fils de Dieu ne voit pas... jusqu'à ce qu'il craigne sérieusement que Jésus saborde son destin. Judas se sent alors le devoir d'intervenir.

À mon échelle, je n'ai pu m'empêcher de repenser à un ami que j'ai invité à rejoindre Espace Pose et qui a contribué avec dévotion à sa fondation. Les premiers malentendus se sont révélés rapidement : cet ami réitérait son idée de développer une fédération nationale alors que nous avions vocation à souder une communauté locale. Je ne me formalisais pas de son imperméabilité à nos clarifications, ni de nos divergences en général, car ses initiatives étaient toujours animées de bonnes intentions ; jusqu'à ce que je réalise qu'elles devenaient contre-productives, continuaient malgré l'émission de refus explicites... et ont finalement causé tort à d'autres membres.

Bien sûr que l'on se sent redevable en recevant de l'aide. Néanmoins, qui dit redevable dit dette ; une dette artificielle et non consentie, contractée de force ou par surprise, inspire moins la gratitude que la crainte de se retrouver dans une situation non désirée ; à juste titre : nous savons à quelle tragédie conduira l'excès de zèle de Judas, prisonnier de ses projections qu'il prenait pour des révélations.

La non nécessité de convaincre

Plus l'arrestation de Jésus approche, moins son entourage, à l'exception de Jean et Marie, ne saisit la portée de ses avertissements. Est-ce l'illusion de son invincibilité après tous ces miracles, ou un refus inconscient qu'il leur soit arraché après lui avoir tout donné ? Toujours est-il que ces scènes contrastent avec ce que Jésus déclame devant ses détracteurs : "que celui qui a des oreilles pour entendre, entende".

Quelle utilité y'a-t-il à débattre avec un enfant qui claironne qu'on a tort de nommer ses sandales des chaussures ? Aucune, mais sans doute est-il plus difficile de rester indifférent lorsque l'on est directement responsable de son éducation. Jésus ne cherche jamais à faire l'unanimité et n'a aucun scrupule à diviser des peuples et des familles ; néanmoins, il s'attriste du déni de ses disciples.

Le miroir du pardon

Une scène en apparence secondaire qui m'a particulièrement marquée, est celle où Matthieu interroge Jésus sur la nécessité de s'excuser lorsque l'on sait d'avance qu'on ne sera jamais pardonné. Jésus répond que le pardon est en effet un cadeau qu'il appartient à l'autre de donner, mais il ajoute surtout ceci : on doit s'excuser, non pour recevoir le pardon, mais pour se repentir.

Aujourd'hui, je peux poser d'autres mots sur ma difficulté à renouer avec d'anciens proches, ceux qui se disaient désolés sans montrer la moindre volonté de faire évoluer la situation : les malheurs qui leur tombaient dessus étaient aussi les miens, mais le fait que je pâtisse de leurs choix ne concernait que moi. Je me suis souvent demandé si je les incriminais par facilité, pour me complaire dans une posture de victime. Le temps a montré que, sur le seul motif qu'ils se sentaient dévastés et dépassés, ils attendaient bel et bien mon empathie inconditionnelle, des explications, ma confiance, une nouvelle chance... le tout sans délai, car si j'étais moi-même dépassée et dévastée, cela ne revêtait aucune importance à leurs yeux.

Heureusement, il existe aussi des personnes qui ont un jour brisé ma confiance et dont je me sens pourtant plus proche que jamais. Ce sont celles qui, au-delà de formuler des remords, s'enquérir de mes besoins et discuter de ce qui m'avait blessée, m'ont laissé le temps nécessaire pour m'en remettre, cherché avec moi des compromis et empêché le scénario de se reproduire. Ces conflits qui consolident, ces "disputes réussies" dont l'explosion a laissé intacte le socle de la relation, ont révélé que cette dernière, loin d'être fragile, était au contraire parmi les plus sincères que j'avais. Tout comme celle entre Matthieu et Pierre.

Le sage et le sachant

Une autre relation dont la sincérité est souvent interrogée dans la série, est celle que chacun entretient avec Dieu ; ce que j'aime également appeler la souveraineté du cœur. Ses aspects tant intimes que publics sont particulièrement développés autour de l'autorité religieuse et politique, incarnée entre autres par Nicodème, Yussif, Samuel, Shammai... Si certains se voient comme d'éternels élèves, prêts à accueillir le message du Fils, d'autres considèrent la moindre remise en question de leur institution comme un blasphème.

Sauf qu'étudier la loi de Dieu n'apporte aucune vérité absolue, pas plus que la représenter n'octroie sa sagesse infinie, car contrairement à ce que tous imaginaient du Messie, Jésus ne lutte ni contre les Romains, ni contre le paganisme, mais contre la déspiritualisation de l'humanité. En enfreignant des interdits du sabbat, il révèle, chez certains pharisiens, un véritable abus spirituel que leur ego déguisait en bienveillance.

Ces scènes m'ont amenée à une réflexion plus générale sur ceux qui, pensant sincèrement mettre leur expérience au service de leur bienveillance, tentent de "corriger" les choix d'autrui... jusqu'à parfois y imposer leurs obsessions personnelles. Or, peut-on encore parler de bienveillance lorsqu'un proche nous dépouille de notre libre-arbitre en n'écoutant, dans les faits, que lui-même ? Peut-il vraiment agir dans nos intérêts en éclipsant nos aspirations avec ses projections, en ébréchant nos ressentis et en négociant nos volontés, en insistant devant nos réserves et en persistant après nos refus ?

J'ai connu plusieurs déconvenues dans mes cercles proches, emplis de bonne volonté mais aussi de certitudes, qui se complaisaient dans un tel fonctionnement. Au nom de la pureté de leurs intentions, ils pouvaient franchir des barrières nécessaires à l'intégrité et à l'intimité... Alors peut-être qu'au fond, leur aide n'était pas si désintéressée : ce qu'ils priorisaient, ce n'était pas le bonheur de leur protégé, mais leur propre posture de sauveur.

Pour certains, leur besoin d'être identifiés en tant qu'intermédiaires indispensables les amenait même à créer des problèmes de toutes pièces ; tout comme les 613 commandements dans la Torah ont pu détourner le Décalogue initial...

Les preuves d'amour

Si nous aimons Dieu, Dieu nous aime-t-il en retour ? Jacques le Mineur, Pierre et Thomas se questionnent tour à tour sur les raisons de Jésus de refuser à ses apôtres les plus fervents, les plus dévoués, ce qu'il offre sans condition à de parfaits inconnus. Alors qu'ils ont tout sacrifié pour le suivre, l'inaction de Jésus devant certains drames semble cruelle, son enseignement injuste et ses mots de réconfort incompréhensibles.

Une nuit de tempête en mer, au comble du désespoir, Pierre laisse éclater sa colère et met Jésus au défi le faire marcher sur l'eau. Or, une des pires façons d'évaluer l'amour que l'autre nous porte est de tester ses failles.

Je crois très fort que face à l'orchestration divine, nous sommes comme des enfants face à leurs parents, dont ils ne peuvent comprendre toutes les décisions véritablement prises dans leur intérêt. Jésus a le pouvoir de mettre fin à toutes les souffrances immédiates, mais il ne le fait pas. Son amour se manifeste dans sa simple présence : il est un compagnon qui donne la force d'avancer. Avec lui, à travers lui, la joie et la paix restent constamment à portée de main.

Jusqu'à ce que ma progéniture trouve un jour cette ressource en elle (car rencontrer Dieu, c'est découvrir en soi plus grand que soi), j'espère incarner pour elle une présence semblable, qui lui apporte la certitude inébranlable d'être infiniment aimée. Que reste-t-il à Pierre lorsqu'il coule ? La main que Jésus tend pour le sauver de la noyade... Il se réfugie dans ses bras, et la tempête finit par passer.

La honte et la salvation

J'ai pleuré, comme soulagée d'un énorme poids, devant l'épisode où plusieurs disciples, tourmentés par leurs péchés passés, entendent que ces derniers ne les définissent pas et qu'ils sont dignes d'être sauvés.

La photographie et les musiques sont sublimes, mais ce qui m'attire et me marque le plus au fil du visionnage de The Chosen, c'est le bien-être constant et persistant que je ressens dans mon âme : jamais je ne me suis sentie aussi nourrie en regardant une série et apaisée en me couchant ensuite.

13
Apr
2025

Le premier coup

J'ai été réveillée ce matin par un petit choc près de mon nombril. J'ai attrapé la main de mon mari encore somnolent, pour la poser sur mon ventre. Nous avons patienté en silence, attentifs au barbotement diffus sous nos doigts... jusqu'à sentir un coup, puis un autre. Cette première communion sensorielle dans notre intimité familiale, ce petit cadeau de la Vie, marque en douceur le passage à la seconde moitié de ma grossesse.

La première moitié, très chaotique et solitaire, a nécessité beaucoup d'ajustements intérieurs, ce qui l'a rendue particulièrement propice à l'introspection et à l'écriture. Je pense qu'aujourd'hui est un bon jour pour en synthétiser les leçons et en délivrer les messages.

Ce que j'ai appris du début de ma grossesse

Cette grossesse est désirée depuis plusieurs années déjà. Si tout semble s'accélérer à une allure folle depuis l'achat de notre maison, n'oublions pas que nous avions auparavant reporté notre projet de famille de quelques années, le temps que je sorte de l'errance médicale autour de mes troubles digestifs puis que j'en guérisse. Ensuite, nous avions tenté de concevoir sans succès durant un an. Ma nouvelle gynécologue nous a alors dirigés vers l'Institut de la Fertilité de Dijon, où nous avons été pris en charge avec beaucoup de bienveillance.

Une nouvelle année plus tard, nous avions enfin une proposition d'assistance médicale, à laquelle mon corps s'est montré réceptif... très réceptif : j'ai ovulé trop tôt durant le cycle de test, avec le risque d'attendre des quadruplés.

Le lâcher-prise incontournable

Ce qui aurait dû être la plus belle nouvelle de toute ma vie, "je suis enceinte", a été d'abord une source d'angoisse : je ne parvenais pas à me réjouir sans aucune information sur la viabilité de cette grossesse, et la médecine ne pouvait rien décréter dans un sens ou dans un autre avant un mois.

Rebelotte trois mois plus tard, lorsqu'après un premier dépistage de la trisomie 21, on m'a annoncé que j'étais à risque. Ma gynécologue est partie en vacances au moment de recevoir les résultats du second dépistage, j'en ai donc eu connaissance au rendez-vous du mois suivant.

J'ai réalisé durant ces épisodes que c'était le lot de toutes les mères et qu'il en serait toujours ainsi désormais : craindre le pire. Sauf que pour mon futur enfant, je me dois d'abord de vivre au présent, afin de lui procurer stabilité et quiétude à chaque instant.

Et puis, comme on dit, s'inquiéter ne supprime pas les soucis de demain mais éloigne la paix d'aujourd'hui. Alors ce pire, j'apprends à l'envisager et à le remettre à la place qui lui revient, celui d'une éventualité parmi tant d'autres auxquelles je ne peux rien aujourd'hui.

Un amour-propre inconditionnel

J'ai également dû lâcher prise sur un aspect de mon quotidien plus discret mais plus pernicieux : l'autodiscipline.

Après ma crise de sens lors du premier confinement du Covid-21, je m'étais imposé une hygiène de vie inspirée des 4 conseils de Marisa Peer pour les entrepreneurs et les sportifs. Elle m'avait permis d'atteindre un bon niveau de productivité tant dans mes activités professionnelles que personnelles, de mener huit projets simultanés jusqu'à leur terme. Surtout, elle m'avait sortie durablement de l'immobilisme, en jalonnant mon sentiment de progression de repères concrets qui créaient un cercle vertueux : ma confiance se nourrissait de ma performance, et réciproquement.

Cependant, à l'apparition des nausées aléatoires dès le second mois, je ne pouvais plus maintenir aucun rythme. Au pied du mur, j'ai fait le point sur ce que je disais à mon inconscient avec une telle routine : commencer la journée avec quelque chose que l'on n'a pas envie de faire, cela conditionne à associer la réussite à l'effort quotidien, au mérite : il faut faire pour obtenir. Et cela fonctionnait à merveille pour le développement logiciel, les projets photo, l'associatif...

Or, la gestation est un état de création, pas une action à exécuter pour en récolter les fruits.

Je crois toujours que les habitudes, et particulièrement la première action au lever, conditionnent l'état d'esprit quotidien, mais désormais, je commence chaque journée avec un plaisir. Pas d'habituation à la pénibilité, pas de récompense délayée... je m'octroie des attentions instantanément et sans contrepartie, ce qui ancre une sérénité salvatrice : tout l'amour, toutes les ressources à ma disposition chaque jour que Dieu fait, tout ce dont j'ai besoin est déjà là pour moi.

Je n'ai ni à conquérir, ni à quémander, je suis digne à chaque instant de ce que je reçois, pour le transformer et le sublimer...

La déconstruction de l'égalité

Mon mari ne pourra jamais me relayer pour porter nos enfants, et de mon côté, je ne pourrai pas reprendre un travail salarié avant quelques années.

Cet état de fait a achevé une transition majeure que notre couple a entamée lorsque j'ai quitté mon poste de développeur logiciel : nous sommes passés de deux ingénieurs indifférenciés, souvent frustrés dans le partage des charges et des tâches quotidiennes à 50-50... aux rôles bien distincts de la mère au foyer et du pourvoyeur de la famille, épanouis dans la répartition complémentaire du temps de travail envers, respectivement, l'intérieur et l'extérieur du foyer.

J'ai conservé ma micro-entreprise pour mes activités secondaires dans le web et la photographie, mais mon métier principal est désormais de régenter notre chez-nous.

Cela semble aisé en théorie. En pratique, il m'aura fallu une année complète pour le vivre avec naturel, sans culpabilité insidieuse ni pensées parasites... Ce parcours, enrichi de l'expériences de mes amies ayant fait le même choix, fera sans doute l'objet d'un article.

Toujours est-il qu'aujourd'hui, je suis ravie de travailler pour notre maison plutôt que pour une entreprise qui n'est pas la mienne, auprès de l'homme qui œuvre à mon bonheur plutôt que d'un patron qui priorise sa rentabilité.

L'harmonie par la spécialisation

Bien sûr, depuis que je suis entièrement en charge de notre intérieur, nous mangeons mieux et nos espaces sont mieux rangés. Mais ce que j'accomplis, c'est bien plus que remplir nos estomacs ou maintenir un environnement propre et fonctionnel... En ayant plus de temps pour cuisiner nos repas, j'en fais chaque jour des rituels de connexion et d'amour. En ayant plus de temps pour aménager chaque recoin de notre maison, j'en fais de petits cocons de convivialité.

Grâce à cela, mon mari n'a jamais été aussi radieux à son travail comme à ses temps de repos. Alors que ses efforts pour l'agréabilité du foyer se heurtaient au jour-le-jour à un plafond de verre, aujourd'hui, il fait bien plus que gérer nos investissements et payer nos charges : il me décharge de toute anxiété liée à notre sécurité matérielle et à notre futur.

Lorsque nous gérions tout à deux, lorsque nous devions chacun penser à tout, avec tant de context switching au quotidien, nous ne nous sentions pas relayés mais éparpillés... et régulièrement épuisés.

Nous restons autonomes en cas de besoin et il arrive souvent que l'un épaule l'autre dans ses attributions. Néanmoins, cela est reçu comme de l'aide, du soin, un don plutôt qu'un dû ; et surtout, cette spécialisation a divisé notre charge mentale par deux : nous sommes bien plus heureux en contribuant là où nous sommes naturellement meilleurs, et même dans la difficulté, cet échange quotidien constitue une source de gratitude infinie.

Nos revenus ont diminué, notre qualité de vie a bondi ; cela n'a pas de prix.

Une organisation permissive

J'ai beau être devenue responsable de notre bien-être au sein du foyer, il m'est impossible de maintenir la même rigueur qu'il y a un an dans mon nouvel état.

Je me suis réconciliée avec cette diminution de productivité car la santé de notre enfant à naître passe avant tout, et passe d'abord par la mienne. Je n'ai pas vraiment eu le loisir de tergiverser sur ce point, chaque coup de barre qui n'a pas été suivi d'une sieste complète a été durement payé le lendemain.

Puis j'ai trouvé la formule qui me convenait lors du troisième mois, après l'arrivée de notre chiot qui nous gratifie d'amour et de traces de boue : planifier des tentatives plutôt que des résultats. Au lieu de faire un gros ménage une fois par semaine, qui me décourage d'avance au point de reporter au moindre petit coup de mou, je le commence deux fois par semaine et le continue le temps que je peux... parfois seulement cinq minutes ! Résultat, notre rez-de-chaussée n'a jamais été aussi propre en continu. Mieux vaut fait que parfait...

Cette nouvelle forme de discipline a fonctionné pour les travaux domestiques, j'ai commencé à l'étendre aux exercices physiques au second semestre et je prévois d'y ajouter la création artistique au troisième.

L'absolu et l'impermanence

Chaque révélation reçue et expérimentée depuis le début de cette grossesse en a renversé d'autres plus anciennes, que je croyais pourtant définitivement acquises. Et nul doute que cela évoluera à nouveau.

Mon mari et moi nous autorisons toujours à changer. D'ailleurs, nous avons toujours eu bien des différences, mais au-dessus d'elles, le même sacré. Nous nous dirigeons ensemble vers notre destination commune, et rien ne nous empêche de modifier l'itinéraire, tant que nous ne perdons pas le Nord.

02
Apr
2025

Je ne suis plus modèle

Durant les treize dernières années, j'ai nourri mon expressivité corporelle et je me suis épanouie dans une démarche constante : la mettre au service de la photographie.

Cela m’a apporté des rencontres incroyables et l’opportunité inestimable de créer avec des artistes extraordinairement talentueux.

Je me suis projetée dans leurs visions.

Et à travers leur regard, leurs idées me donnaient corps.

Aujourd'hui, cette création est ailleurs.

Je nourris autre chose.

Mon corps existe pour autre chose.

Une chose merveilleuse, qui me dépasse.

Un absolu qui occupe tout l’espace.

J'attends un heureux événement pour cet été, et depuis cet hiver, mon monde se transforme à une vitesse folle.

Mon corps, mon quotidien, mon énergie...

Je traverse ces bouleversements, ou plutôt, ils me traversent telle une tempête chaotique de peur et de joie.

La photographie m'appelle toujours, mais...

Cet appel a changé.

Je n’arrive plus à absorber vos personnages, à interpréter vos images à naître.

Je ne suis plus en capacité d’incarner une autre histoire que la mienne.

Je ne me considère plus comme un modèle.

Peut-être est-ce temporaire.

Quel rapport aurai-je à mon corps après avoir porté la vie ?

Comment appréhenderai-je l’extérieur suite à ces chamboulements intérieurs ?

Quelle place et quelle forme prendra la création dorénavant ?

L’Avenir nous le dira.

Je ne disparais pas, mais j’ignore encore comment évoluera ma présence en ligne... Je me laisserai porter par le flot.

Je ne peux vous promettre que de rester sincère et entière, comme dans tout ce que je vous ai partagé jusqu'à présent.

Je vous remercie du fond du coeur.

Pour votre présence, votre confiance, votre fidélité et votre bienveillance, tout au long de ces treize années.

Elles sont inoubliables, grâce à vous.

À bientôt

20
Sep
2024

Lettre d'espoir

Chère Caroline de 2008,

Tu quittes le chemin tracé hier par les adultes, car c'est toi qui deviens adulte aujourd'hui.

Tu vivras mal les choix déjà faits pour toi, et tu te sentiras revivre en t'y opposant.

Cependant, tu réaliseras bien vite qu'il n'y a aucun bonheur dans une rébellion qui détruit sans construire, car en imaginant le futur, tu ne verras toujours qu'un tunnel noir.

Ta force sera de te souvenir qu'enfant, tu rêvais d'infinis possibles, radieux, et de continuer à croire qu'ils dorment quelque part en toi.

Tu chercheras tes rêves dans le militantisme pour tes idéaux, dans l’expérimentation artistique, dans la fusion relationnelle.

Tu réussiras dans les trois et tu échoueras dans les trois, jusqu’à comprendre que ton identité, ta valeur, ton essence, ne se situent ni dans tes opinions, ni dans tes productions, ni dans l’approbation de ton entourage.

Tu seras trahie, tu seras abandonnée.
Tu seras l'objet de calomnies en cherchant le compromis.

Tu te sentiras vide.

Et à la dixième fois, tu comprendras que ce vide béant n'est pas ton insuffisance.
C’est la place pour ton futur radieux, libérée par tes rêves qui n’ont jamais dormi.

Merci d’avoir cru en moi et persévéré.
Sans toi, je n’existerais pas.

Avec amour et gratitude,

Caroline, heureuse en 2024

10
Jul
2024

Déesse intérieure

Le 1er juillet 2024

Feu divin rédempteur
Puissance d’actif solaire
Voile couleur feu aux éclats d’or
Féminin purificateur, maternel, maternant
Paix et force associées pour la Liberté.

Madone de l’Eternel.

Ton souffle embrase ton feu intérieur, feu divin, rayonnant de Vie et d’Amour.

Guidance et illustration : Alexandra Banti

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