01
Jan
2024

Écouter le corps

Depuis mon hospitalisation, il m'a fallu m'adapter non seulement au fait d'être diminuée sans en connaître la raison, mais aussi à ce que mes états émotionnels les plus intimes se traduisent désormais en états corporels. J'avais déjà des amis qui somatisent tout pour avoir conscience de l'existence de ce phénomène, mais c'est autre chose de se mettre à le subir du jour au lendemain, dans une forme exacerbée.

La première année, comme mes amis, je le vivais comme un véritable handicap dont je me serais bien passée : c'est déjà pénible en soi de ressentir de l'angoisse ou de la colère, alors pourquoi en rajouter une couche avec des problèmes de peau, d'articulation ou de digestion...

J'ai commencé à changer de point de vue lorsque j'ai déménagé à Dijon, loin de la frénésie et de l'insécurité de Guillotière. Oui, les maux de dos et de ventre que j'avais développés en conséquence de mon quotidien dans ce quartier étaient physiquement handicapants. Mais si cela avait été plus supportable, ne m'en serais-je pas accommodée, et me serais donc privée d'un meilleur environnement quelques années de plus ? C'était chaotique, inconfortable, mais cela m'a poussée pour le mieux.

Ma démarche générale a commencé par un retour au stoïcisme : accepter ces réactions corporelles que je ne peux pas changer, accueillir les crises tout comme les émotions désagréables qui doivent nous traverser avant de repartir ; et ensuite concentrer mon attention sur ce sur quoi je peux réellement agir.

Désormais, je me sers de cette sensibilité physique à la fois comme moteur pour une vie meilleure, et comme instrument de mesure de la justesse de mes choix. Depuis mes fiançailles, le dernier symptôme du SIBO qui subsistait a complètement disparu. Je vivais normalement depuis mon dernier traitement, je vis aujourd'hui comme si je n'avais jamais été malade.

12
Oct
2022

Chez Bertrand

Durant mon dernier séjour à Lyon, Jérôme est passé pour quelques photos esprit rétro, chez mon ami Bertrand où j'étais hébergée. C'était notre troisième séance ensemble, et l'occasion de faire le point sur notre évolution à chacun depuis la précédente, il y a deux ans.

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La dernière fois que j'avais vu Jérôme, donc, j'étais dans l'errance médicale, avec un début d'amaigrissement inexpliqué. Je me sentais aérienne, presque transparente. Cette fois, je me suis sentie ancrée.

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La difficulté de faire des photos dans un appartement, c'est de trouver des endroits avec à la fois une jolie lumière et assez de recul, mais nous avons relevé le défi près de la baie vitrée et en face.

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J'ai eu le cœur un peu serré en voyant les aperçus. Je me laisse pousser les cheveux depuis ma sortie de l'hôpital il y a trois ans, je m'étais dit à l'époque que je les couperais lorsque je serais guérie. Aujourd'hui, ils m'arrivent presque à la taille.

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Je vous laisse avec un bonus de notre séance précédente, il y a deux ans.

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Photographe : Jérôme Kubiaczyk

03
Oct
2022

32 ans

J'ai 32 ans aujourd'hui. Je les ai célébrés autour d'une belle table au Médiéval.

J'aurai une consultation en fin d'après-midi pour faire le point après mon dernier test respiratoire. Je ne suis toujours pas guérie, je ne m'autorise toujours aucune consommation d'alcool, mais c'est déjà réconfortant de pouvoir faire des écarts alimentaires occasionnels sans finir alitée. J'aime la Bourgogne, sa gastronomie, ses spécialités au cassis.

22
Sep
2022

Se punir pour les autres

L'autre jour au téléphone, ma mère plaisantait sur le fait que je pouvais moi aussi "avoir mon caractère" au niveau relationnel. Je l'ai alors informée très sérieusement que je suivais une psychothérapie en parallèle de ma médication, car les maladies digestives ne se soignent pas dans l'anxiété ou la colère.

Je n'attendais pas de retour particulier, mais elle a abordé sa propre évolution dans sa gestion des émotions. Elle m'a expliqué que ce travail que je faisais pour guérir, elle le faisait car l'âge passant, chaque accès de colère l'épuisait toujours davantage, au minimum plusieurs jours d'affilée.
Et elle m'a cité ce proverbe :

生气
就是在拿别人的错误来惩罚自己

En français : être en colère, c'est se punir pour les erreurs des autres.

10
Sep
2022

Ce que j'ai appris de mon séjour à l'hôpital

J'évoquais dans le précédent article une hospitalisation, voici un résumé du contexte médical avant d'entrer dans le vif du sujet.

On avait vu une iléite terminale lors de l'échographie aux urgences, mais on n'en a jamais identifié la cause, et j'ai d'ailleurs rechuté un an plus tard sans davantage d'information sur ce qui m'infectait. Je raconterai l'errance médicale qui s'est ensuivie dans un prochain article...

Des sophismes lourds de conséquences sur la santé

J'étais végane depuis six ans, et je faisais scrupuleusement des analyses de carences tous les ans pour m'assurer que les choix alimentaires qui accompagnaient cette démarche ne portaient pas atteinte à ma santé. J'ai pu me rendre compte d'une chose en entrant aux urgences : avoir des analyses sanguines impeccables ne prouve pas que l'on est en bonne santé, puisque j'étais littéralement en train de crever. Mesurer des taux dans le sang en dit bien peu sur l'état des os, des muqueuses, des tissus, des intestins... et pourtant la logique voudrait qu'on pense à ces derniers concernant l'impact d'une restriction alimentaire, mais à l'époque, je réduisais l'alimentation aux apports nutritionnels, oubliant que l'aliment est plus qu'une somme de nutriments et que le métabolisme est un acteur primordial dans le processus de digestion.
Je ne me jette pas la pierre outre mesure car ce n'était jamais abordé dans les contenus que je lisais malgré une veille active sur ces questions. L'acidification du corps durant la digestion des protéines animales nous est régulièrement rappelée pour nous convaincre de passer à une alimentation entièrement végétale, pour autant je n'ai jamais vu un seul animaliste évoquer le phénomène opposé que peut provoquer le végétalisme, à savoir l'hypochlorhydrie, avec ses conséquences désastreuses sur la partie haute du système gastro-digestif. De même, on nous bassine avec la présence prétendument suffisante des 8 acides aminés essentiels pour synthétiser nos protéines, mais on n'évoque pas le fait que les cellules épithéliales qui tapissent l'intestin métabolisent directement 2/3 de la L-glutamine qui s'y trouve... un acide aminé considéré pourtant comme "pas essentiel". Je pourrais continuer avec la supplémentation conseillée qui contient la plupart du temps de la vitamine B12 sous une forme que l'organisme stocke mal, souvent la cyanocobalamine, vantée pour sa haute assimilation, au détriment de l'hydroxocobalamine qui renouvelle les réserves de l'organisme au lieu de simplement ralentir leur diminution. Ou sur le fait qu'en cas d'hypothyroïdie, le bêta-carotène n'est plus converti en vitamine A, elle-même nécessaire à la conversion de T4 en T3 et aggravant l'hypothyroïdie, ce phénomène est de plus à la fois cofacteur et conséquence d'un manque de progestérone pour les femmes, avec les troubles que l'on connaît : SPM, adénomyose, endométriose, SOPK...

Toujours est-il qu'à ma sortie de l'hôpital, parmi les nombreux aliments que je ne digérais plus, figuraient l'intégralité des légumineuses et la plupart des céréales. Plus tard, alors que j'assumais enfin de remanger des produits animaux, d'autres personnes que je connaissais dans ce milieu sont venues m'avouer qu'après 5 à 7 ans de véganisme, elles avaient développé des troubles hormonaux et/ou digestifs difficiles voire invalidants, et que comme moi, ayant passé les premières années d'alimentation végétale sans aucun problème, elles avaient conclu que celle-ci ne pourrait plus être un facteur de détérioration de la santé et ont trainé à l'envisager parmi les causes de l'enfer qu'elles vivaient. Nous avons constaté ensemble qu'un changement d'alimentation peut causer des dérèglements durables bien des années plus tard sur l'organisme, du moins les rendre particulièrement propices, et il était naïf de notre part d'en exclure l'idée avec le véganisme, dont la propagation est bien trop récente pour que ses conséquences long terme aient pu être étudiées sur de grands nombres. Le bon sens aurait pu nous faire remarquer que l'on connaît, par ailleurs, bien des facteurs de cancers et autres maladies graves, qui ne toucheront pas toutes les personnes exposées et dont on prévoit les conséquences pour au moins des décennies plus tard. Personne ne dirait que fumer n'est pas néfaste pour ses poumons sur le seul constat qu'il n'a jusqu'ici eu aucun problème respiratoire.

Des contraintes sans impact sur la cause défendue

Un autre aspect lié à cette importante partie idéologique de ma vie à l'époque a sauté en parcourant l'excellent livre Comment réussir à échouer de Paul Watzlawick, prêté par un ami pour m'occuper lorsque je n'avais pas de visite, et qui m'a fait réfléchir sur des exemples de mon expérience personnelle.
Il a été difficile pour moi de le reconnaître, mais je n'avais sauvé aucun animal en étant végane. Dans une économie où le gaspillage est préféré à la pénurie, les produits animaux ne sont pas créés en flux tendu. Si l'on peut identifier l'animal auquel appartenait le corps dont on se repaît, lequel n'est pas tué lorsqu'on mange autre chose ? Est-ce que manger un peu de viande plutôt que pas du tout en changeait suffisamment la demande pour en influencer la production sur le marché ? Malgré le fait que j'ai toujours été arrangeante lorsque je sortais ou me faisais inviter, j'ai eu le sentiment d'avoir seulement érigé de beaux principes en bannière durant ces six ans, avec pour conséquences de créer des contraintes pour la partie de mon entourage qui n'embrassait pas ces principes et me donner une dose de moraline à chaque repas en n'ayant absolument rien changé à la vie d'aucun animal.

Régler mes problèmes avant de sauver le monde

Tout a commencé en réfléchissant sur la partie antispéciste de mon militantisme, et s'est progressivement étendu au reste. Me consacrer aux malheurs du monde était un facteur à la fois d'angoisse profonde et de sentiment d'impuissance, dont la culpabilité était un tourment pour moi, tandis que son poids restait sans effet sur la réalité de l'objet de mes obsessions.

Cette façon de prioriser les choses nourrissait activement ma dépression, j'en veux pour preuve que cette dernière n'a plus jamais refait surface depuis que mon attention est tournée vers ce sur quoi j'ai réellement un pouvoir d'action.

07
Sep
2022

Renaissance

07 Sep 2022

Ce premier article a pour titre « Renaissance », car je souhaite évoquer, en prémices du reste, celle qui a eu lieu lors de mon hospitalisation en 2019.

La dépression me tournait autour depuis dix ans, et j'étais à l'agonie depuis plusieurs jours dans cette chambre blanche, hydratée par voie intraveineuse car mon corps ne supportait même plus l'eau.
Ce jour-là, alors que mes inclinations à me laisser mourir étaient plus nombreuses que jamais, et que je disposais d'un cadre qui s'y prêtait bien, je me suis découvert tout au fond de ce lit d'hôpital un profond désir de vivre. Rien de rationnel, de raisonnable, de réfléchi, juste un élan indescriptible, accompagné d'une voix qui répétait « pas maintenant » et des larmes à n'en plus finir.
Ma santé physique et psychologique était des plus déplorables, pourtant, au moment le plus misérable de mon existence, j'ai cru que je pouvais me construire une vie heureuse, et j'en ai pris le chemin.

Aujourd'hui, cela fait 3 ans exactement que j'ai entamé ce tournant, et c'est un anniversaire à célébrer.